En sortant de la projection du deuxième long métrage de Faouzi Bensaïdi, WWW : What a wonderful world, mes sentiments sont aussi partagés que l’avis du public.
Il s’agit sans aucun doute d’un film original, qui s’affranchit des conventions cinématographiques en mélangeant les genres, en bousculant le montage et en assumant ses imperfections. Le réalisateur possède un univers bien à lui, et porte avec ce film un regard iconoclaste, mais plein de tendresse, sur la ville de Casablanca et quelques-uns de ses habitants.
Mais le projet était sans doute trop ambitieux pour un réalisateur, certes déjà primé pour ses courts-métrages et son premier long, Mille mois, mais encore trop inexpérimenté pour porter son projet de bout en bout.
L’histoire suit le parcours de plusieurs personnages au sein de Casablanca : Kamel, un tueur à gage qui reçoit ses contrats par internet (joué par le réalisateur lui-même), a coutume d’appeler Souad, une prostituée occasionnelle, pour faire l’amour après ses exécutions. C’est souvent Kenza (Nezha Rahile) qui décroche. Elle est agent de la circulation, responsable du plus grand rond-point de la ville. Bientôt, il tombe amoureux de cette voix et part à sa recherche. Plusieurs autres personnages gravitent autour de ces personnages : un photographe, la femme d’un soldat qui délaisse sa famille, Hicham, un jeune hacker rêvant de partir en Europe, et son père, infirme, vaguement escroc et alcoolique…
Le résultat est un patchwork assez hétéroclite, hésitant trop entre comédie et drame et souffrant de l’utilisation d’effets de mise en scène un peu trop appuyés par moments, mais également rempli de bonnes idées et d’une poésie cinématographique assez rare pour être soulignée.
Il est difficile de ne pas penser à Intervention divine de Suleiman, aux films de Kitano, pour les moments de sérénité presque comiques avant le drame, à Tati pour la poésie burlesque.
Mais les références peuvent nuire à ce film pas totalement abouti.
Les plus belles séquences sont celles qui montrent la dualité de la ville de Casablanca, partagée entre ses vieux quartiers traditionnels et les bâtisses modernes, d’inspiration occidentale. Et par extension une société Marocaine riche de ses paradoxes, de ses oppositions.
La mise en scène joue beaucoup sur la composition géométrique des images, sur le cadre, pour montrer le morcellement de cette société et les différentes facettes des personnages.
L’un des premiers plans montre la moitié du visage de Kamel, avec la plage au fond. Vers la fin du film, cette séquence trouvera son complément avec un plan montrant conjointement la moitié du visage du personnage et la moitié de celui de Kenza. Complémentarité des êtres, attirance des contraires (la flic et le tueur).
De même, l’image est souvent séparée par un élément central qui cache l’action principale.
Ceci permet d’accentuer davantage le thème du double, de la dualité.
Ceci permet également au réalisateur de rappeler que l’intérêt de son film ne réside pas dans l’action principale, mais plus dans ses à côtés poétiques.
Comme ce ballet d’automobiles sur un rond-point…
Comme ces surimpressions d’images de la ville…
Comme cet enchaînement magnifique entre la rencontre d’un radeau de clandestins avec un paquebot luxueux, et la scène du vieil infirme en fauteuil roulant au milieu de la circulation…
Rien que pour ces quelques séquences, et en dépit de ses nombreux défauts, le film mérite d’être vu…
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Réalisateur : Faouzi Bensaïdi
Avec : Faouzi Bensaïdi, Nezha Rahil
Origine : Maroc
Genre : Comédie dramatique
Durée : 1h39
Date de sortie France : 10/01/2007
Note pour ce film :
contrepoint critique chez : –
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