Tian Fushi vit à Haimen, une grosse ville chinoise surpeuplée et sans charme… même ses bords de mer sont maussades. Maussade, à l’image de la vie de Tian. Tian est homosexuel, situation difficile à assumer dans cette Chine hyper-conservatrice, alors Tian oscille entre triste, cynique, désabusé, furieux ou apathique, mais heureux, jamais… ou alors, pas très longtemps : Tian s’interdisant lui-même le bonheur, il s’affairera sur-le-champ à gâcher cet instant. Et afin d’être sûr de bien gâcher sa vie, Tian trouvera tout ce qu’il lui faut en déambulant dans les ruelles crades et sordides de Haimen, noyant sous des flots d’alcool, de drogue et de déchéance une ribambelle de relations amoureuses toxiques, relations sexuelles hardcore, ou de relations amicales tout aussi peu reluisantes, impliquant systématiquement de pauvres galériens tout aussi paumés que lui !
Pour nous entrainer sur les pas de son héros lors de ses déambulations psychologicosexuelles, Seven opte pour un visuel radical à base de dessins inspirés des manga indé’ au trait incisif et totalement fou qui explose les proportions et les perspectives ; trait qu’il n’hésite pas à poser sur des photos floues, surexposées, aux couleurs saturées, ou totalement déformées par des effets numériques pour un rendu hallucinant et halluciné… comme si vous étiez vous-mêmes en train de badder avec Tian sous l’effet de divers psychotropes bien vénères !
Ce Chinese Queer résulte en un instantané trash et violent d’une jeunesse chinoise paumée, explorant ses rapports à l’amour, au travail, à la pression sociale, à leur propre image – celle qu’on lui impose et celle qu’elle voudrait renvoyer – à la vie en général, et à la ville en particulier…
…via le portrait acerbe et acide de Tian, la quête identitaire de toute une jeunesse qui se cherche, mais qui finit par se détruire plus qu’elle ne se trouve, broyer par la pression tant sociale que culturelle d’un pays ô combien autoritaire.
Chinese queer, de Seven (Ed. Sarbacane)