Forcément, appartenant à ces premières générations de vieux geeks élevés aux animés japonais, moi, quand on me dit « Heidi », je pense tout de suite à cette petite fille des montagnes qui partageait mes mercredis après-midis sur un air de yodle aux accents nippons.
Aussi, quelle ne fut pas ma surprise lorsque je me penchai pour la première fois cette Heidi au printemps qui s’effeuillait au fur et à mesure que je feuilletais…!
Non, non : reposez ce téléphone ! Nul besoin de prévenir la Brigade des Mineurs : l’Heidi qui s’effeuille ici n’est plus une petit fille, rassurez-vous !
Après une brève présentation revenant sur les bases du personnage telles que nous les connaissons, c’est sur une Heidi bien plus épanouie qu’a choisi de se pencher l’auteure de ce beau roman graphique.
Enfin, « épanouie » ne se révélera pas forcément être le terme le plus approprié au prime abord, lorsque l’on découvre la vie de cette adolescente perdue dans les alpages, s’ennuyant à mourir au côté de son vieil oncle – si aimant soit-il – et ayant pour seule distraction de vendre des fromages à une poignée de vieux villageois quelques peu séniles entre deux chapitres d’une bible lue, relue et re-relue…
Heureusement, sa correspondance avec son amie de la ville reste une belle échappatoire, surtout lorsque celle-ci lui décrit par le menu les beaux garçons qui gravitent autour d’elle, les avances gourmandes qu’ils lui font, et son envie non moins gourmande d’y répondre !
Toute émoustillée par ces coquine missives tant que par l’arrivée du printemps, la jeune Heidi sent la sève monter en elle et considère tout ce qui l’entoure d’un nouvel œil… particulièrement ce jeune berger qui perdra bien vite son statut d’innocent ami d’enfance pour celui d’objet de tous les désirs inavouables !
D’un trait simple et épuré, plein d’innocence – voire de naïveté – mais aussi de sensualité – voire d’érotisme – Marie Spénale nous offre donc un conte iniatique sur le passage à l’âge adulte, où les derniers remparts de l’enfance tombent au fur et à mesure que la petite Heidi découvre les moindres recoins de son corps, mais aussi de son âme… et de celle de ses proches. Un récit tout en nuances où s’alternent la joie et la mélancolie, la passion et l’ennui, le désir et l’angoisse… Des nuances subtilement appuyées par une jolie mise en couleur qui souligne habilement les temps qui passe, les saisons qui se suivent, et les émotions qui se bousculent dans le corps et le cœur en ébullition de la petite montagnarde.
Pour sa première bande dessinée, Marie Spénale réussit admirablement son coup d’essai et nous livre un album totalement maitrisé, la jeune auteure se souciant de chaque détail de sa réalisation ; jusqu’à cette sublime couverture, véritable explosion de fraicheur, de douceur… et de torride tension sexuelle !
Heidi au printemps, de Marie Spénale (ed. Delcourt).
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