– Carnet de santé foireuse, de Pozla –

C’est un fait : le caca, c’est drôle.
Enfin, pas le caca en soi, évidemment, mais parler de caca.
D’ailleurs, dans les premières pages de ce Carnet de santé foireuse, j’avoue, j’ai bien ri quand Pozla nous parle de l’hyperactivité de son transit, de ses ruses de sioux pour éviter d’en faire profiter son entourage, puis carrément du fait de l’assumer à 200%… jusqu’à le revendiquer haut et fort !
D’autant que le lascar nous illustre ces exquises situations d’un trait simple mais hautement expressif, non sans rappeler les grandes heures du célèbre journal d’Umour & Bandessinées… pour notre plus grand plaisir !

Et puis BIM !, la douleur s’installe : Pozla ne parle plus que d’un simple et rigolo « caca mou » un peu trop régulier, mais d’un véritable supplice qui lui tord les boyaux, une véritable torture dont les séances se rapprochent et s’intensifient de plus en plus. Et l’incapacité du corps médical à le soulager, ou tant bien même à nommer son mal, n’arrange rien : aux douleurs abdominales il faut également ajouter l’angoisse qui assaille son esprit à chaque nouvelle crise !
Pourtant, quand le verdict tombe enfin – après avoir consulté d’innombrables spécialistes – le soulagement tant espéré n’est qu’illusoire : Pozla est atteint de la maladie de Crohn, et devra dorénavant vivre avec un mal qui grandit en lui et le dévore de l’intérieur tel un parasite alien.
Ces états de souffrance tant physique que morale, il les exprimera sur le papier en noircissant les feuilles de son carnet de manière frénétique, son trait fin sus-cité se complexifiant, se boursoufflant, enflant, adoptant un côté presque organique… à l’image de l’anarchie anatomique qui ravage ses entrailles !

Pourtant, malgré ce sujet des plus durs, jamais ce carnet ne nous paraît plombant. Au contraire, on en ressort bluffés par son courage et son envie – sa rage – de vaincre cette putain de maladie ; hallucinés par l’humour, le recul, et parfois même la poésie avec lesquels il l’aborde ; touchés par le soutien inconditionnel et l’amour dont fera preuve sa femme tout au long de son combat…

Ce Carnet de santé foireuse – drôle, beau, poignant, parfois étouffant mais toujours réjouissant – est un gros livre par son volume (368 pages !), et un grand livre par son contenu…
…bravo !

Carnet de santé foireuse, de Pozla (ed. Delcourt).

Edit : Retrouvez ici l’intervew de Pozla réalisée par l’amie Lulu lors du festival Quai des Bulles 2015.