En apparence, Antoine est un homme comblé. Son travail d’avocat le passionne et lui procure un train de vie tout à fait correct. Il a une femme douce et aimante, deux beaux enfants qui font sa fierté. Mais il manque quelque chose à sa vie, sans qu’il en ait encore conscience. Un vide à combler qui pourrait avoir un lien avec sa propre enfance, et des relations familiales tendues. Avec son père, un homme assez froid, qui ne lui a jamais vraiment prodigué d’affection et qui continue de le malmener à la première occasion. Et avec son frère, fils préféré et fils prodigue, un salaud qui profite des largesses de ses proches sans jamais manifester la moindre once de reconnaissance…
Un jour, Antoine est convoqué par le professeur principal de son fils, afin de parler des mauvaises notes de ce dernier. Mais curieusement, la discussion porte plus sur l’attitude d’Antoine vis-à-vis de son enfant. Elle l’incite à méditer ce point.
Quelques jours plus tard, Antoine reçoit une invitation à participer à un séminaire d’éducation religieuse, via l’enseignant. Il est tout d’abord surpris du procédé. Pourquoi l’homme lui envoie-t-il cela? Et qu’irait-il faire là-bas, lui, l’athée convaincu?
Il se rend quand même au rendez-vous par politesse, et y retourne par curiosité, sans le dire à ses proches. Au fil des sessions, il se découvre une foi en Dieu qui bouleverse ses principes et remet en question son attitude parfois hautaine et méprisante vis-à-vis des autres…
Mais cette révélation divine n’est pas sans occasionner quelques remous dans son couple et sa vie de famille…
Cela sentait le film-piège…
Sur un tel sujet, on pouvait craindre un mélo familial pesant sur fond de morale catholique envahissante, nappé de mièvrerie et de bons sentiments.
Pourtant, force est de reconnaître qu’il n’en est rien. Le film joue au contraire la carte de la sobriété et de la pudeur, et peut se targuer d’être constamment juste.
Il faut dire que la réalisatrice, Anne Giafferi, qui signe ici son premier long-métrage, maîtrise totalement son sujet.
Et pour cause ! Cette histoire, c’est la sienne… Et celle de son compagnon, l’écrivain Thierry Bizot, qui avait déjà raconté sa rencontre avec Dieu et son “coming-out spirituel” dans son livre “Catholique anonyme” (1).
Les deux scénaristes (2) savent exactement ce que ressentent les personnages principaux pour avoir vécu directement les situations qu’ils décrivent…
Du coup, il leur suffisait juste de trouver les acteurs susceptibles de les incarner sur grand écran. Et ils l’ont fait avec discernement : Eric Caravaca porte le film à lui tout seul, tour à tour fonceur engoncé dans ses certitudes, un brin rude et égocentrique, reproduisant malgré lui le comportement de son propre père, et homme fragile un brin honteux de cette foi soudaine qui l’a envahi. Arly Jover lui oppose calme et douceur, et est également très bien en femme désemparée, délaissée au profit d’un dieu auquel elle ne croit même pas (voilà un adultère des plus cocasses…)
A leurs côtés, on retrouve Valérie Bonneton dans son registre de prédilection, la fantaisie lunaire, en grande soeur en manque d’amour, Jean-Luc Bideau en père de famille ne sachant pas comment aimer, et Benjamin Biolay en rebelle n’aimant rien ni personne… Sans oublier Philippe Duquesne en prêtre gouailleur et le jeune Quentin Grosset, épatant en adolescent réclamant du regard un peu d’affection paternelle…
Mais la force du film vient surtout de la mise en scène sobre et pleine d’humilité d’Anne Giafferi, qui ne s’appesantit jamais sur les situations mélodramatiques.
A l’instar du dessinateur Jean-Jacques Sempé, qui a signé la belle affiche du film, la cinéaste va toujours à l’essentiel, à l’aide de scènes courtes suffisamment explicites pour permettre au spectateur de saisir le contexte dans lequel évoluent les personnages, et de deviner les questions qui les agitent, tout en donnant au film une tonalité douce-amère.
L’émotion passe par les regards complices ou antagonistes, inquisiteurs ou suppliants et par quelques répliques incisives…
A l’arrivée, cela donne un petit film tout simple, plein de charme et d’élégance, qui traite de la foi et de la religion sans point de vue polémique et sans jugement à l’emporte-pièce mais avec, au contraire finesse et subtilité.
Qui a envie d’être aimé ? Tout le monde, évidemment…
Qui aimera ce long-métrage ? Peut-être pas tout le monde, d’accord, mais gageons que de nombreux spectateurs se laisseront séduire…
(1) : “Catholique anonyme” de Thierry Bizot – coll. Cadres rouges – éd. Seuil
(2) : On leur doit la série “Fais pas ci, fais pas ça” sur France 2
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Qui a envie d’être aimé ?
Qui a envie d’être aimé ?
Réalisatrice : Anne Giafferi
Avec : Eric Caravaca, Arly Jover, Valérie Bonneton, Jean-Luc Bideau, Benjamin Biolay
Origine : France
Genre : pas mal, ma foi…
Durée : 1h29
Date de sortie France : 09/02/2011
Note pour ce film : ●●●●○○
contrepoint critique chez : Le Nouvel Obs
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Et True Grit alors ?
Hé! Non mais c’est pas fini, ce harcèlement !?!
C’est dingue, ces gens qui habitent à l’est et qui veulent absolument avoir mon avis sur un héros de l’Ouest… 🙂
Toujours pas vu « True Grit ». Je n’ai pas pu aller aux projos presse, ni aux avant-premières.
Il sort mercredi, donc dès que je l’aurai vu je le chroniquerai.
Patience…