On n’ira pas, comme Vincent Delerm, jusqu’à lui composer une chanson, mais on ne peut qu’admirer Fanny Ardant et la belle carrière qu’elle a su mener, au cinéma, à la télévision ou au théâtre. Celle qui fut l’actrice-fétiche de François Truffaut, sa muse, a assurément ce petit quelque chose de plus qui fait les grandes actrices. Il y a sa voix, déjà, parfaitement reconnaissable, et son phrasé si particulier. Mais il y a aussi son allure altière, son charisme rayonnant, et sa capacité à jouer très naturellement des personnages complexes.

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Elle est une fois de plus formidable dans Les Beaux jours, le nouveau film de Marion Vernoux, en réussissant à nous faire accepter sans peine l’idée-force du film : la liaison d’une sexagénaire mal dans sa peau et d’un trentenaire sexuellement très actif
Evidemment, hors de question de faire du personnage une vulgaire “cougar”. L’actrice a trop de classe pour cela.  
Caroline (Fanny Ardant) est une femme qui prend conscience de son âge et se sent glisser inexorablement vers la vieillesse et la mort. Peut-être parce que la Grande Faucheuse a déjà sévi dans son entourage, emportant sa meilleure amie suite à un cancer du sein. Elle s’en veut de ne pas avoir été à ses côtés pour ses derniers instants. Tout ça pour soigner quelques molaires de plus, pratiquer des détartrages et des blanchiments dentaires sur des patients parfois insupportables. Alors elle a décidé de fermer son cabinet dentaire sur un coup de tête et de prendre sa retraite. Et depuis, elle s’enfonce dans la dépression.
Son mari Philippe(Patrick Chesnais) est toujours à ses côtés, mais leur relation n’est plus aussi solide qu’autrefois. Ils sont entrés dans une sorte de routine conjugale confortable, mais où la passion s’éteint à petit feu. Un vieux couple qui va finir ses jours ensemble plus par habitude que par amour.

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Ses filles, inquiètes de la voir se morfondre à la maison, lui offrent une inscription aux “Beaux Jours”, un centre d’activité pour “séniors”. Pour Caroline, c’est une nouvelle claque, un avant-goût de la maison de retraite… Quelle horreur! Alors elle se braque, forcément, envoyant promener la pauvre prof de théâtre qui a eu le malheur de lui demander de simuler un rire. Comme si elle avait envie de se forcer à rire! Comme si elle n’avait pas conscience de la tragédie qui la guette! Non, décidément, cet établissement n’est pas fait pour elle…

Pourtant, des problèmes de connexion internet insolubles vont l’inciter à assister au cours d’informatique. Au moins, cela sera utile…
C’est là qu’elle rencontre Julien (Laurent Lafitte), le professeur, expert en Word/Excel le jour et amant insatiable le soir. Il enchaîne les conquêtes féminines comme les slides sur power point. Hop, un click et il passe à la suivante. D’habitude, toutes sont des femmes jeunes, mais pour Caroline, il fait une exception. Il y a quelque chose qui l’attire chez cette femme mûre. C’est lui qui fait le premier pas, en l’invitant à déjeuner, qui essaie de la charmer de plus en plus ouvertement. Caroline ne résiste pas longtemps. Elle est flattée de voir un homme qui a l’âge de ses filles la courtiser et excitée à l’idée de revivre un amour charnel passionnel.
Mais leur liaison ne tarde pas à se heurter à deux écueils de taille. D’une part le mari de Caroline, qui n’est pas franchement d’humeur à accepter ce rôle de cocu, surtout après avoir supporté la dépression de son épouse lors des derniers mois. Et d’autre part la boulimie sexuelle de Julien, qui continue de fréquenter d’autres femmes en plus de sa liaison avec la sexagénaire…

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Cette situation crée un petit suspense. Caroline et Julien vont-ils démarrer une nouvelle vie ensemble? Vont-ils finir par se séparer? Quel impact leur liaison va-t-elle avoir sur leurs proches?
Mais le plus important, dans ce film, n’est pas forcément le dénouement. C’est surtout la raison profonde qui pousse ces deux êtres à se fréquenter et à s’aimer. Caroline et Julien ont besoin l’un de l’autre parce qu’ils comblent chacun un vide chez l’autre, et ouvrent de nouvelles perspectives.
Julien semble le plus fort des deux, psychologiquement, mais ce n’est qu’une façade. En fait, il souffre d’une certaine solitude, un manque affectif qu’il cherche désespérément à combler en empilant les conquêtes. Mais  évidemment, celles-ci ne restent jamais, lassées de ses infidélités ou de son hyperactivité sexuelle. Il aime la stabilité de Caroline, et cette maturité qui lui fait défaut. Il l’envie aussi, car si leur liaison se termine, sa maîtresse pourra retourner tranquillement auprès de son mari et de ses filles.
Caroline, elle, aime le côté passionnel de leur relation. Elle est vexée de voir son amant fréquenter d’autres femmes bien plus jeunes et plus belles qu’elle, mais cette jalousie apporte du piment à leurs rapports. Elle se sent revivre. Avec Philippe, les rapports sexuels ne sont plus ce qu’ils ont été. Là, elle redécouvre son corps, se dit qu’elle peut encore plaire et encore éprouver du plaisir.

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Peu importe l’issue de cette liaison. Ce qui compte, pour elle, c’est de se sentir encore dans le jeu, de tenir la mort à distance et aussi, peut-être d’accepter son âge sereinement, en prenant conscience qu’il lui reste encore de beaux moments à vivre. De beaux jours…
En ce sens, elle se rapproche un peu du personnage de Myrtle Gordon, l’héroïne d’Opening night. Loin de nous l’idée de comparer le chef d’oeuvre de Cassavetes au “petit” film de Marion Vernoux, mais il y a bien des points communs entre les vertiges éprouvés par Caroline/Fanny Ardant et par Myrtle/Gena Rowlands. Sans oublier la scène du cours de théâtre, au début du film, qui sert de trait d’union invisible entre ces deux films, ces deux personnages. 

Marion Vernoux ne nous en voudra probablement pas de ce rapprochement avec Cassavetes, même si elle, de son côté, cite plus volontiers l’influence de Sautet ou de Lelouch pour ce film. En tout cas, Les Beaux jours porte indéniablement la propre patte de la cinéaste, qui n’avait plus tourné pour le grand écran depuis 2004 et A boire. Marion Vernoux y retrouve ses thèmes de prédilection : l’infidélité, le couple, la confrontation de plusieurs solitudes… Et, comme dans ses films précédents, elle fait la part belle aux personnages, s’appuyant sur un casting efficace. A commencer, donc, par Fanny Ardant…

On n’ira pas jusqu’à lui composer une chanson, non. On se contentera juste de saluer son travail d’actrice formidable dans ce joli film intimiste, tout en nuances et en subtilité. Et de lui souhaiter encore de nombreux beaux jours et de nombreux beaux films…

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Les Beaux jours Les Beaux jours
Les Beaux jours

Réalisatrice : Marion Vernoux
Avec : Fanny Ardant, Laurent Lafitte, Patrick Chesnais, Jean-François Stévenin, Fanny Cottençon
Origine : France
Genre : passion “ardante”
Durée : 1h34
Date de sortie France : 19/06/2013
Note pour ce film : ●●●●
Contrepoint critique : Ecran Large

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