Yann Kermadec (François Cluzet) a de la chance. Il réalise le rêve de sa vie. Le forfait de dernière de minute de son ami Franck Drevil (Guillaume Canet), pour cause de blessure, lui a permis de prendre sa place sur son voilier et de participer au célèbre Vendée Globe, la course autour du Monde sans escale et en solitaire. Et cela lui réussit plutôt bien puisqu’il est en tête après juste quelques jours de course, battant tous les records.
Mais la chance tourne…  Un détritus flottant qui vient percuter l’embarcation, le contraignant à faire une pause pour réparer les dégâts, près des côtes des îles Canaries. Il perd beaucoup d’énergie à bricoler la pièce endommagée, sans aide extérieure, évidemment, et se fait dépasser par la majorité des concurrents. Et ce n’est que le début des ennuis…

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En effet, il découvre avec stupeur qu’il a un passager clandestin. En voyant le pavillon tricolore accroché au mât du bateau, Mano Ixa (Samy Seghir), un adolescent mauritanien, s’est dit que l’embarcation allait pouvoir l’emmener jusqu’à sa destination rêvée, la France. Il a profité de l’immobilisation du bateau aux îles Canaries pour se faufiler à bord, sans se douter, évidemment, que le voilier se dirigeait vers la direction opposée.
Si le skipper envisage un temps de débarquer au plus vite l’intrus, dont la présence pourrait le disqualifier de la course, il arrive plus vite que prévu au Cap de Bonne Espérance. Et là, en plein dans les quarantièmes rugissants, puis dans les cinquantièmes hurlants, difficile de s’arrêter pour y déposer le passager clandestin…
Pas le choix, Yann et Mano vont devoir cohabiter pendant de longues semaines et partager les rations de nourriture. Au cours des nombreuses épreuves imposées par les océans et les vents, ils vont peu à peu apprendre à se connaître et à s’apprécier…

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On devine ce qui a séduit le cinéaste Christophe Offenstein dans cette aventure. L’habituel chef-opérateur de Guillaume Canet, passionné de navigation, a voulu relever le défi technique que constituait le tournage de ce film : réaliser des prises de vue dans un espace aussi exigu qu’un habitacle de voilier monocoque, avec une équipe forcément réduite, et dans des conditions climatiques assez rudes.
De ce point de vue-là, le film est réussi. Le cinéaste tient bon la barre et parvient à nous faire ressentir l’excitation du skipper, seul face aux éléments déchaînés. Hélas, il n’a pas osé se cantonner au seul bateau, et nous gratifie, en parallèle de la vie sur le bateau, de quelques scènes d’une platitude totale, montrant les difficultés de la fille du navigateur (Dana Prigent) à sympathiser avec sa nouvelle compagne (Virginie Efira), le dépit de Franck, frustré d’être resté à terre, la pression du sponsor pour obtenir des images exploitables du parcours du bateau…

On devine aussi ce qui a intéressé le producteur/scénariste du film. L’histoire permettait de broder autour des belles valeurs sur les vertus du sport, de la solidarité des marins entre eux et avec les autres, et des difficultés que rencontrent les jeunes africains pour réaliser leur rêve d’Europe, et faire de l’oeuvre un grand film humaniste. Hélas, c’est par ce biais que le film prend l’eau, de toutes parts…
Déjà, l’argument scénaristique ne tient pas. On a du mal à imaginer un navigateur en course pour la victoire dans le Vendée Globe s’embarrasser d’un clandestin pendant deux mois, avec ce que cela suppose comme problèmes au niveau des rations alimentaires. Comme il est ridicule qu’il craigne être disqualifié à cause de la présence d’un intrus à bord. Ce n’est pas de sa faute sI le jeune mauritanien est grimpé à bord… Il suffirait d’appeler le PC de course pour qu’il vienne récupérer le gamin et le ramène dans son pays d’origine, non?

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Evidemment, si cela se règle ainsi, on perd le coeur du film : l’évolution de la relation entre le marin bourru, obsédé uniquement par sa course, et le gamin, effrayé à l’idée d’être abandonné sur une île au milieu de nulle part par son compagnon de bord. Mais en même temps, le réalisateur n’exploite quasiment pas l’idée. Le changement d’attitude de Yann envers Mano est beaucoup trop brusque – aussi rapide et incongru que le soudain rapprochement entre la fille du navigateur et sa belle-mère – et ne conduit à rien d’autre qu’à une fin ridicule, en plus d’être dégoulinante de mièvrerie.
On sent que les scénaristes lorgnent du coté de Welcome de Philippe Lioret, qui reposait peu ou prou sur le même type de situation, l’homme bourru qui se lie finalement d’amitié avec un gamin immigré et l’aide à accomplir son rêve d’exode. Mais on reste très loin de la portée sociale de ce dernier film, et l’émotion ne passe pas vraiment non plus…

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Autre problème, et non des moindres, le film est truffé de poncifs qui alourdissent considérablement l’intrigue. Un exemple? Le personnage de Mano lui-même… Non content de chercher à pénétrer illégalement sur le sol français, le jeune homme cherche aussi à s’y faire soigner – car il est atteint de drépanocytose – et éventuellement devenir une star du ballon rond. Arf… Que cela manque de finesse…

On devine enfin les raisons qui ont poussé certains généreux donateurs à s’associer au projet. La voile du bateau ou les objets numériques utilisés par François Cluzet permettent un placement de produit intensif (1). Et tant pis si certains spectateurs trouveront cela un brin lourdingue, sur plus d’une heure et demie de métrage…

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Bref, à cause d’un scénario à la dérive et de choix de mise en scène discutable, En solitaire ne convainc pas. Son seul intérêt est la prouesse technique que constitue sa réalisation, dans des conditions difficiles, et la volonté de proposer au spectateur une expérience immersive totale. Mais là encore, le film ne soutient pas du tout la comparaison avec un film comme Gravity, qui a le mérite d’aller au bout de sa démarche artistique, ou d’un All is lost (2), qui montre avec bien plus de puissance le combat d’un homme seul contre l’Océan.
Merci, mais dans ces conditions, on préfère rester à quai et attendre d’embarquer sur un film plus intéressant, qui nous fera plus voyager, rire, frémir, pleurer que cette production balourde et, finalement, assez ennuyeuse.

(1) : La production a racheté le voilier DCNS, qui a participé à l’édition 2008 du Vendée Globe. Mais il y a bien placement de produit, puisque la marque est citée à maintes reprises au cours du film. Difficile de croire que la société n’ait pas versé un financement pour obtenir cela. Idem pour le matériel Apple qu’utilise fréquemment le navigateur. Nous prendrait-on pour des pommes?
(2) : un petit chef d’oeuvre, dont la sortie est prévue en décembre prochain.

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En solitaire En solitaire
En solitaire 

Réalisateur : Christophe Offenstein
Avec : François Cluzet, Samy Seghir, Virginie Efira, Guillaume Canet, Arly Jover, Karine Vanasse
Origine : France
Genre : marin, mais terre-à-terre
Durée : 1h34
Date de sortie France : 06/11/2013
Note pour ce film : :●●
Contrepoint critique : Le Parisien

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