En août 2014, les soldats de Daech ont mené une offensive dans le Sinjar, au nord de l’Iraq. La communauté kurde Yézidi qui y vivait a été surprise par cette attaque barbare. Les hommes ont tous été assassinés. Les enfants ont été envoyés dans des camps de conditionnement pour en faire des enfants-soldats, prêts à mourir pour l’Etat Islamique. Les femmes, qui ont assisté, impuissantes, à tout cela, ont ensuite été violées, torturées et vendues comme esclaves sexuelles. Parmi celles qui ont réussi à s’échapper, beaucoup ont encore trouvé le courage et l’énergie de prendre les armes pour se battre contre Daech et reprendre par la force leurs territoires.
Les Filles du soleil nous entraîne dans le sillage d’un de ces bataillons de femmes, alors que se prépare l’offensive sur un village kurde, bastion stratégique de Daech dont la chute permettra, quelques mois plus tard, la fin de l’Etat Islamique. Mathilde (Emmanuelle Bercot) un reporter de guerre, les accompagne et, en attendant l’assaut, découvre l’histoire de leur leader, Bahar (Golshifteh Farahani), avocate reconvertie en combattante par la force des choses, après avoir perdu ses proches et survécu à quatre captivités.
On comprend qu’Eva Husson ait choisi, pour son second long-métrage, de rendre hommage au courage de ces femmes combattantes, luttant moins pour leur survie que pour retrouver leur dignité et leur honneur volés par les intégristes. Ses intentions sont on ne peut plus louables. Mais hélas, les bonnes intentions ne font pas forcément les bons films.
Les Filles du soleil souffre de trop nombreux défauts pour susciter l’adhésion, à commencer par un très gros problème d’écriture et d’architecture du scénario.
Déjà, on peut regretter le choix de ne se focaliser que sur Bahar. Ainsi, le spectateur n’a pas le temps de s’attacher aux autres combattantes du groupe, dont les destins sont pourtant assez similaires, et éprouvera un peu moins d’empathie quand ces dernières finiront par tomber sous les balles ennemies. Eva Husson aurait gagné à s’intéresser davantage à ces femmes brisées qu’au personnage de Mathilde, dont les états d’âmes, aussi touchants soient-ils, n’ont pas la même portée dramatique.
L’idée d’évoquer l’histoire de Bahar par le biais de longs flashbacks s’avère tout aussi contre-productive. Puisque cette femme est bien vivante et prête à donner l’assaut, c’est qu’elle a réussi à échapper à ses geôliers. Ceci désamorce grandement la tension de la longue scène détaillant son évasion.
Avec ces partis-pris narratifs, la cinéaste se tire une balle dans le pied. Son récit manque d’intensité, de tension, d’enjeux et ne réussit pas à émouvoir comme il le devrait, malgré les efforts des actrices, plutôt justes et convaincantes. Il souffre de la comparaison, par exemple, avec une oeuvre comme Une famille syrienne, un huis-clos terrifiant qui réussit à décrire avec beaucoup plus de force ce que la cinéaste peine à retranscrire.
Le manque de finesse des dialogues, trop écrits, et le choix d’une musique envahissante pour surligner la plupart des évènements dramatiques n’arrangent rien à l’affaire. L’ensemble donne l’impression d’un récit trop fabriqué pour être sincère quand l’idée de la cinéaste était probablement de rappeler au public occidental l’authenticité de ces tragédies humaines qu’ils se refusent à voir.
Malgré son sujet fort, son casting impeccable, son budget confortable, Les Filles du soleil s’apparente hélas à un beau gâchis…