le livre d'imagesDepuis les années 2000, Jean-Luc Godard a totalement délaissé le cinéma “classique” –  si tant est que le cinéaste, emblématique de la Nouvelle Vague, ait jamais signé des films “normaux” – pour signer des films plus expérimentaux, à la fois poétiques, politiques et philosophiques. Son nouveau long-métrage, présenté en compétition sur la Croisette, Le Livre d’image s’inscrit dans la même veine.

Sur la forme, il s’agit d’un assemblage hétéroclite d’extraits de films, d’images d’archives, de reportages télévisés, de photos d’oeuvres d’art, accompagné d’un assemblage hétéroclite de répliques de films, de lectures de textes et d’aphorismes. Un grand fourre-tout censé représenter la pensée bouillonnante de JLG ou un nouveau langage, plus poétique, procédant par associations d’idées, jeu de coq-à-l’âne et calembours godardiens.

Mais sur le fond, le film développe un propos clair et cohérent. Le cinéaste s’interroge sur l’état du monde contemporain et ses résonnances avec d’autres périodes de l’histoire, comme si l’histoire de l’humanité était une succession de mauvais remakes d’un mauvais film. Il s’intéresse particulièrement aux relations souvent tendues entre l’Occident et le Monde Arabe, au conflit syrien, aux mouvements révolutionnaires qui essaient ça et là de changer l’ordre établi, à la violence faite aux femmes… Le Livre d’image est une oeuvre à la fois totalement dans l’air du temps, connectée à des problématiques contemporaines, et ancrée dans le passé, pour mieux rappeler les leçons de l’Histoire.

Evidemment, un tel film ne manquera pas de diviser fortement les cinéphiles. Les inconditionnels de Godard vont crier au génie. Ses détracteurs vont se déchaîner contre ce qu’ils considèrent comme une escroquerie cinématographique ou une blague de mauvais goût. Entre ces deux extrêmes, tout dépendra de votre faculté à lâcher-prise et à vous laisser porter par le flot d’images, de sons et de pensées, comme on peut s’abandonner à une rêverie. Pour avoir joué le jeu, le résultat n’est pas déplaisant, même si, avouons-le, ce curieux Livre d’image ne nous laissera probablement pas de souvenirs inoubliables.

REVIEW OVERVIEW
Note :
SHARE
Previous article[Cannes 2018] Jour 3 : Sexe, mensonges et vidéo (ou pas)
Next article[Cannes 2018] “Les Eternels” de Jia Zhang-Ke
Rédacteur en chef de Angle[s] de vue, Boustoune est un cinéphile passionné qui fréquente assidument les salles obscures et les festivals depuis plus de vingt ans (rhôô, le vieux...) Il aime tous les genres cinématographiques, mais il a un faible pour le cinéma alternatif, riche et complexe. Autant dire que les oeuvres de David Lynch ou de Peter Greenaway le mettent littéralement en transe, ce qui le fait passer pour un doux dingue vaguement masochiste auprès des gens dit « normaux »… Ah, et il possède aussi un humour assez particulier, ironique et porté sur, aux choix, le calembour foireux ou le bon mot de génie…

LEAVE A REPLY