Les César – 36ème saison – viennent de rendre leur verdict au terme d’une soirée assez terne.
Pourtant, tout avait bien commencé avec joli discours, dans un français parfait, de Jodie Foster, présidente de la cérémonie cette année, puis un petit speech rigolo et plein de classe de Jean Rochefort qui a remis les clés de la cérémonie à Antoine de Caunes. Et enfin, un petit montage vidéo montrant ce dernier au coeur des grands films français de l’année, dans l’esprit des séquences jadis tournées par Billy Crystal aux Oscars.
Mais après, ça s’est un peu gâté : Vannes qui tombent à plat car pas drôles ou un peu trop offensives (Les oreilles de Jean-Luc Delarue ont dû siffler…), qui n’ont extirpé que des rires gênés à un public un brin coincé. Gags lourdingues à forte connotation animalière, comme ces“fuck” tarantinesques qui se transforment en “phoque” sur scène (ça sentait le poisson et pourtant, on n’est pas en avril…) ou la venue de Vincent Pérez avec un poussin dans les mains (what the fuck, justement?). Ridicule célébration du 1000ème lauréat d’un César (en l’occurrence David Fincher pour son Social network, prix du meilleur film étranger) avec un chèque de 2000 et quelques euros, comme à un tirage du loto (un poussin d’avril?). Et ennuyeux, aussi, les vrai/faux numéros de François Damiens et Pascal Elbé en nommés vexés de n’avoir pas eu le César (car déjà vus au moins dix fois…).
Bref, ce fût, comme souvent, trop plat, trop long, trop et pas assez farfelu en même temps…
Mais revenons aux récompenses.
Grand favori de la cérémonie de par sa capacité à fédérer critiques, cinéphiles et grand public, Des hommes et des dieux a gagné le César du meilleur film, mais n’a pas remporté le raz-de-marée attendu. Il doit se contenter des César du meilleur second rôle masculin pour Michael Lonsdale et de la meilleur photo pour Caroline Champetier (ce n’est que justice!).
Le film de Xavier Beauvois doit partager son sacre national avec The Ghost writer, qui remporte le trophée de la meilleure adaptation, celui du meilleur montage et celui de la meilleure musique, pour les variations hermanno-hitchcockiennes d’Alexandre Desplat. Mais surtout celui du meilleur réalisateur pour Roman Polanski, qui remporte sa troisième statuette de meilleur cinéaste, record égalé…
Les prix d’interprétation ont réservé leur lot de surprises. On attendait Lambert Wilson, mais c’est Eric Elmosnino qui remporte le César du meilleur acteur. C’est amplement mérité tant l’acteur est bluffant dans la peau de Serge Gainsbourg, dans Gainsbourg, vie héroïque.
Et Sara Forestier, après son César du meilleur espoir féminin en 2005, triomphe des favorites Catherine Deneuve et Kristin Scott Thomas et gagne le trophée de meilleure actrice pour son rôle dans Le Nom des gens.
Ces films sont les deux autres grands gagnants de la cérémonie.
Le film de Joann Sfar obtient les trophées de meilleur premier film et du meilleur son. Celui de Michel Leclerc et Baya Kasmi glane le prix du meilleur scénario original.
De quoi nous ravir puisque ce sont deux films que nous avons aimés et défendus dans ces colonnes.
Nous sommes aussi très content de voir le César du meilleur film d’animation – le premier du nom – revenir au magnifique film de Sylvain Chomet, L’Illusionniste.
Une bonne idée… Il est juste bizarre que l’Académie ait mélangé courts et longs métrage dans cette même catégorie, alors qu’il y avait suffisamment de postulants pour deux catégories distinctes. Une catégorie spécialement dédiée aux courts-métrages d’animation aurait permis de récompenser Logorama et de laisser le César du meilleur court-métrage à un autre prétendant. Le court de François Hervé de Crécy, François Allaux et Ludovic Houplain fait le doublé après l’Oscar de l’an passé…
La cérémonie a été marquée par de nombreux hommages aux gens de cinéma disparus cette année : Bernard Giraudeau, Claude Chabrol, Maria Schneider…
De façon curieuse, beaucoup de ces hommages ont eu lieu dans des sketches de présentation des nommés… Parmi les plus marquants, celui de Jodie Foster à Chabrol, la chaise vide de Jafar Panahi et surtout la prière inattendue adressée par Michael Lonsdale à… Michael Jackson.
Mais l’émotion est surtout venue de la jeune génération : larmes de la charmante et talentueuse Leïla Bekhti, trémolos dans la voix d’Edgar Ramirez, respectivement primés en tant que meilleur espoir féminin et masculin. Energie folle et spontanéité de Sara Forestier, César de la meilleure actrice après avoir gagné le prix du meilleur espoir féminin il y a quelques années.
Sinon, on regrettera que repartent bredouilles non pas Les Petits mouchoirs, dont on se fiche royalement, mais Tournée d’Amalric, Carlos d’Assayas ou Mammuth de Kervern & Delépine. Et que Le bruit des glaçons se contente d’un prix du second rôle féminin pour Anne Alvaro.
Pour finir, félicitons-nous de la bonne santé du cinéma français et reprenons les mots de Quentin Tarantino, à qui l’académie a rendu hommage “Vive le cinéma !”
Palmarès complet
Meilleur film : | Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois |
Meilleur réalisateur : | Roman Polanski pour The Ghost writer |
Meilleure actrice : | Sara Forestier pour Le Nom des gens de Michel Leclerc |
Meilleur acteur : | Eric Elmosnino pour Gainsbourg, vie héroïque de Joann Sfar |
Meilleur second rôle féminin : | Anne Alvaro pour Le bruit des glaçons de Bertrand Blier |
Meilleur second rôle masculin : | Michael Lonsdale pour Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois |
Meilleur espoir féminin : | Leïla Bekhti pour Tout ce qui brille de Géraldine Nakache & Hervé Mimran |
Meilleur espoir masculin : | Edgar Ramirez pour Carlos, le film d’Olivier Assayas |
Meilleur premier film : |
Gainsbourg, vie héroïque de Joann Sfar |
Meilleur film étranger : | The Social Network de David Fincher |
Meilleur film d’animation : | L’Illusionniste de Sylvain Chomet |
Meilleur scénario original : | Michel Leclerc & Baya Kasmi pour Le Nom des gens de Michel Leclerc |
Meilleure adaptation : | Robert Harris & Roman Polanski pour The Ghost writer de Roman Polanski |
Meilleur montage : | Hervé Deluze pour The Ghost writer de Roman Polanski |
Meilleure photo : | Caroline Champetier pour Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois |
Meilleure musique : | Alexandre Desplat pour The Ghost writer de Roman Polanski |
Meilleur son : | Daniel Sobrino, Jean Goudier, Cyril Holtz pour Gainsbourg, vie héroïque de Joann Sfar |
Meilleurs décors : | Hughes Tissandier pour Les aventures fantastiques d’Adèle Blanc-Sec de Luc Besson |
Meilleurs costumes : | Caroline de Vivaise pour La Princesse de Montpensier de Bertrand Tavernier |
Meilleur film documentaire : | Océans de Jacques Perrin & Jacques Cluzaud |
Meilleur court-métrage :
|
Logorama de François Hervé de Crécy, François Allaux et Ludovic Houplain. |
César d’honneur : | Quentin Tarantino |
Woohoo !
Après avoir été de ceux qui ont révolutionné le monde poussiéreux de la BD, Joann Sfar fait une entrée remarquée au cinéma !!