Depuis le tremblement de terre médiatique provoqué par l’Affaire Weinstein et l’avènement du hashtag « #MeToo », nous assistons à une véritable avalanche de témoignages de femmes violées ou agressées sexuellement dont la parole se libère enfin. Cette libération de la parole s’observant dans chaque milieu, c’est aujourd’hui au monde de la bande dessinée d’y prendre part via l’album justement intitulé #BalanceTaBulle.
Dans ce recueil, pas moins de soixante artistes laissent libre cours à leurs pinceaux afin d’exprimer les terribles expériences qu’elles ont vécues ; certaines attaquant le sujet de façon frontale, d’autres de façon plus métaphorique, presque abstraite… comme si, plus que des mots, il s’agissait des douloureux sentiments enfouis trop longtemps au plus profond d’elles qu’elles lâchaient enfin sur le papier.
En résulte des histoires courtes (de 2 à 4 pages) ne prenant pas quatre chemins pour nous atteindre directement au cœur – ou au visage, telle une bonne gifle – aux aspects et aux sensibilités bien différentes selon l’autrice se livrant, tant d’un point de vue graphique qu’émotionnel. Palette d’émotions très diverses pour le lecteur également, allant de l’empathie à la colère face au traumatisme des victimes, en passant par la stupeur lorsque des infos hallucinantes nous sont rapportées ; qu’il s’agisse de chiffres tels le nombre d’agressions perpétrées chaque année, ou encore le fait si choquant que la plupart dedites agressions soient rarement l’acte d’un inconnu, mais bien souvent d’un proche… professeur, ami, ou même membre de la famille !
Et si certains récits traitant d’horreurs insoutenables telles que le viol ou l’inceste nous retournent forcément les tripes, la retranscription d’un malaise – voire d’une blessure – suscité par un geste malvenu (une caresse imposée dans les cheveux, une main s’éternisant volontairement sur une épaule, un simple regard trop insistant) ou une remarque déplacée sera tout aussi essentiel ; capable de nous faire ouvrir les yeux sur ce qui reste trop souvent considéré comme de l’humour plus ou moins fin ou de la drague plus ou moins lourde par les uns, mais s’avère finalement être perçu comme une réelle agression par la personne la subissant !
Un album doublement essentiel, donc : un cri d’alarme pour leurs autrices, un signal d’alarme pour le lecteur… exutoire autant qu’éducatif !
#BalanceTaBulle, collectif dirigé par Diane Noomin (Massot Editions)