Si seulement j’avais su…
Oui, si seulement on m’avait prévenu que ma vie de trentenaire serait celle ci, aurais je changé des choses ? Si le Vinz’ de 15 piges, insouciant, insolent, ballon de basket greffé à la main avait rencontré le Vinz’ vieux et sage qui écrit ces quelques mots aujourd’hui, l’aurait-il écouté ? A moins que ce dernier n’ait eu à rendre des comptes sur les quelques rêves enterrés, les éventuelles ambitions piétinées…
C’est sur ce thème philosophico-fantastiques que Carole Maurel nous embarque aujourd’hui en orchestrant la rencontre entre Luisa… et Luisa.
La Luisa de 33 ans, jonglant entre une situation amoureuse caricaturale par son côté éphémère et un métier alimentaire peu reluisant ; et la Luisa de 15 ans, aussi tourmentée que rebelle et idéaliste.
Qu’avons nous fait de nos 20 ans… ou qu’allons-nous faire de nos 30 ? Voici les deux côtés d’un même miroir que les Luisa voient éclater sous leurs yeux.
Carole Maurel, cerne avec tendresse cette période charnière dans la construction de ce que l’on devient, cette période redoutée autant qu’attendue: l’adolescence.
Cette période où s’affirmer est un challenge, mais où ne pas le faire est une pierre posée sur des sables mouvants.
Se faire juger par les autres pour ses choix est parfois dur à accepter, mais quand le jugement vient de soi-même, c’est une autre histoire : avec 18 ans d’écart, là, on frôle l’incident diplomatique.
La confrontation des deux générations d’une même personne est divinement mise en scène dans ce one shot : Luisa(s) pourrai(en)t être vous, moi, n’importe qui, mais surtout c’est un récit touchant qui aborde la réussite, l’épanouissement, l’acception de soi, de sa sexualité.
L’aspect fantastique de cette improbable rencontre entre les deux Luisa passe au second plan, l’accent se posant finalement plus sur l’introspection et le côté humain de cette fable.
D’un point de vue visuel, on est tout autant ravi par cet album, le trait délicat de Carole Maurel qui nous avait tant séduit dans l’Apocalypse selon Magda faisant encore ici des merveilles, et les inserts noir et blanc pour les flashbacks ponctuant idéalement ce récit haut en couleur.
Un album touchant, sensible et passionnant qui me donnerait presque l’envie de ranger mon DVD de Camille redouble.
Luisa ici et là, de Carole Maurel (ed. La Boîte à Bulles).
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