Le « pitch » ?
Suite à un agent mutagène se propageant via la nourriture, la quasi-totalité de la population se voit transformée en d’horribles monstres. Les mutants, violents et surnombres, mènent une véritable chasse aux quelques êtres encore « sains », forçant ceux-ci à quitter les villes et (sur)vivre à l’écart de tout, tel des bêtes traquées et affamées.
Alors oui, forcément, avec un tel postulat de base, vous vous attendez à un énième ersatz de Walking Dead, avec son lot de scènes gores et de clichés bien ‘ricains, mais ça, c’est sans compter sur le talent de Pierre Maurel.
Transposant ces codes classiques de la série Z sur notre vieux continent, le jeune auteur issu de la BD indé’ délaisse les canons du genre et préfère aux incroyables scènes d’action noyées sous des hectolitres d’hémoglobine, un récit beaucoup plus intime et subtil, desservi par une ligne claire toute en rondeur et joliment colorée.
Un récit se focalisant sur deux jeunes adolescents pile à l’inverse des héros testostéronés qui défoncent du mutant à coups de pelle dans la tronche, cherchant au contraire à les éviter au maximum tout en espérant tomber au plus vite sur cette mystérieuse colonie d’êtres sains vivant en harmonie parfaite loin de toutes ces horreurs.
De là, le bouquin que l’on pouvait appréhender comme un survival à la sauce franco-belge change doucement de cap pour se rapprocher mine de rien de la satire sociale, s’amusant des dérives de cette communauté faussement idyllique pour mieux pointer du doigt les travers de notre propre société.
A l’heure où beaucoup cherchent à s’emparer de ce genre apocalypto-horrifique très en vogue sans jamais parvenir à le révolutionner vraiment, Pierre Maurel lui adresse donc un joli pied de nez en le détournant habillement pour nous offrir une bédé gentiment socialo-écolo-militante au message on ne peut plus d’actualité.
Tabula Rasa, de Pierre Maurel (ed. Gallimard – Bayou).