Faustine est seule.
Seule, sans sa mère… Partie ? Morte ? Absente.
Faustine lui parle pourtant tous les jours… via son dictaphone grâce auquel elle raconte sa vie sur des petites cassettes, qu’elle empile ensuite précieusement dans une petite boite.
Seule, sans son père… Bien souvent absent pour son travail, et tout aussi absent lorsqu’il est présent physiquement : il traine dans leur appartement, sans dire un mot, affublé d’un étrange masque d’oiseau. Faustine ne le comprend plus, et quand elle lui fait part de son désarroi, il lui raconte des histoires à dormir debout qu’elle ne sait comment interpréter.
Seule, dans son appartement… situé au-dessus d’un théâtre abandonné aux airs fantomatiques, sur le même palier qu’un mystérieux voisin invisible… Ah si, il y a bien la vieille Mme Nicolof, mais si elle parle beaucoup, la pauvre femme n’a finalement pas grand-chose d’intéressant à raconter.
Seule, dans sa vie… attendant patiemment que la journée se passe, constamment perdue dans ses pensées et errant dans les couloirs de son lycée sans jamais échanger un mot avec quiconque… Ah si, il y a bien Samir, le garçon le plus cool du monde, qui l’aide à s’évader de ce triste monde grâce à sa bonne humeur et ses drogues douces.
Et puis il y a ce volcan, quelque part en Islande, qui fume tellement qu’il empêche tout le monde de s’envoler… le rapport avec Faustine ? Aucun, à priori.
Et puis il y a nous, lecteurs, quelques peu désarçonnés par Faustine et sa solitude… solitude qu’elle subit via l’absence de ses proches et leur manque d’amour envers elle ; solitude qu’elle s’impose via son incapacité à communiquer et son manque d’intégration dans cette société qu’elle ne comprend pas.
Et pourtant, à mesure qu’on se laisse envahir par son spleen et sa mélancolie, on s’attache à cette jeune fille, on est touchés par sa fragilité et sa sensibilité, ainsi que par la poésie et l’onirisme qui émane de ce monde à part et bien à elle.
Touchés, donc, mais aussi intrigués grâce à cette pincée de fantastique qui s’invitera insidieusement dans les dernières pages de cet album, laissant présager une suite pleine de surprises à cette étrange mais envoutante ouverture.
Des fragments de l’oubli – Tome 1/3, de Serge Annequin (ed. Paquet – Calamar).