Dans un article précédent (click) je qualifiais le style de Terreur Graphique comme un savant mix entre Ivan brun, Blanquet, Joe Matt et Crumb. Mais en réalité, plus je m’intéresse à son travail, moins ces comparaisons me semblent évidentes. Même si l’on sent clairement certaines influences (principalement issues de la BD underground américaine), Terreur Graphique développe un style bien à lui et reconnaissable au premier coup d’œil : un trait épais, propre et précis, des personnages tout ronds aux abords sympathiques, une maîtrise du découpage et du cadrage, un art du symbolisme, de l’ellipse et de la métaphore.
Un nombre incroyable de qualités que l’on retrouve aujourd’hui réunies dans La rupture tranquille, un recueil d’histoires courtes, indépendantes ou non – certaines se répondant ou se déclinant selon plusieurs angles de vue-, et prônant de belles et grandes valeurs : la famille, le travail, la religion… et surtout, l’Amour.
Bon, c’est vrai : je dois bien avouer que son trait propre et précis a parfois tendance à dégouliner salement et à se cradifier un poil. OK, je vous accorde aussi que ses personnages tout-ronds-tout-mignons ont la méchante habitude de suivre la même voie, crades et dégoulinants ; dégoulinants de tout un tas de sécrétions et liquides organiques divers : sueur, sperme, sang, gerbe, menstrues, cyprine, pus, sébum…
Du coup, les thèmes abordés – les valeurs, tout ça – risquent de morfler sévèrement au passage : rien n’effraie môssieur Terreur Graphique, alors en avant pour le grand carnage !
La famille, on la découpe et on l’enterre dans le jardin ; le travail, on s’y suicide ; quant à la religion, je vous laisse imaginer comment sera réinterprétée la phrase biblique « laissez venir à moi les petits enfants ».
Et l’Amour, me direz-vous ? Plus physique que romantique, brutal et pas forcément consenti, il rimera avec triolisme, onanisme, adultère, inceste, viol, fellation, sodomie, zoophilie, gérontophilie, pédophilie… et tout ça, sans user du fameux sens de la métaphore sus-cité : le choc sera frontal !
L’enfance, la pauvreté, la maladie, et même le Père-Noël : rien ni personne ne sera épargné par cette redoutable déferlante d’humour ravageur, iconoclaste et immoral à souhait !
Alors oui, j’en vois déjà prêts à ressortir l’éternel débat : « peut-on rire de tout ? », mais moi, perso’, quand l’irrévérence est exécutée avec tant de talent, j’ai envie de dire : la bienséance, on s’en branle !
La rupture tranquille, de Terreur Graphique (ed. Même Pas Mal).
Pingback: Hello my name is Terreur Graphique - Pas ça, Monique !
Pingback: – Interview de Fabien Grolleau & Terreur Graphique - | LA RUBRIQUE-A-BRAC