Marge est triste : l’homme qu’elle aime vient de périr à la guerre.
Heureusement, elle n’est pas seule, il lui reste Craig, son fils né alors que son père partait grossir les rangs de l’armée américaine.
Mais bien vite, elle devra accepter l’idée que Craig n’est pas comme les autres : à 8 ans, déjà, Craig est un grand garçon, très grand pour son âge. Aussi grand qu’elle, en fait.
A 10 ans, Craig est un très grand garçon, très très grand pour son âge. Peut-être trop grand, en fait.
A 12 ans, Craig est un très très grand garçon, immensément grand pour son âge. Bien trop grand, en fait.
Alors, de par sa taille hors du commun, Graig devient la mascotte de l’équipe de basket de son village, puis bien vite, une véritable vedette locale ! Mais pour sa mère, sa grande taille pose un problème : le mode de vie qu’elle lui impose creuse un véritable fossé entre elle et lui… et plus il grandit, plus l’écart se marque.
Puis, Craig par à l’université. Il y rencontrera Jo, une minette bien mignonne qui, intriguée par ce phénomène, fera tout pour l’approcher. Sa curiosité deviendra vite de l’attirance, puis de l’amour. Comme dans les contes de fées, Craig et Jo se marieront et auront beaucoup d’enfants.
En fait, non : la vie n’étant pas vraiment un conte de fées, ils n’auront pas beaucoup d’enfants, mais juste un. Ensuite, sa taille de plus en plus démesurée compliquera les rapports physiques. Puis compliquera les rapports, tout court. Puis, compliquera tout, finalement.
Car lorsqu’on est un géant, la vie de tous les jours n’est décidément pas des plus aisées : difficile de se vêtir, de se chausser, de trouver des lunettes, de se soigner…
Et la théorie de la relativité étant ce qu’elle est, plus il deviendra grand, plus ses problèmes le seront, grands.
De par ses oreilles surdimensionnées, les phrases qu’on lui adressera seront perçues telles de lointains murmures, et, de toute façon, s’il tentait une réponse, ses cordes vocales du diamètre d’un tronc d’arbre exploseraient nos frêles tympans. Ses réflexes seront considérablement ralentis par la distance imposée au message parcourant ses nerfs longs de dix mètres, et sa vision extra-large sera tellement inadaptée à notre monde de lilliputiens qu’il risquerait d’écraser une poignée de badauds à chacun de ses pas.
Quand le moindre de vos mouvements devient un danger pour autrui et vous-même, quel autre solution que l’exil ?
Ainsi, à travers le regard des trois femmes de sa vie – sa mère, sa femme, sa fille – nous connaitrons la véritable histoire de ce géant que tout le monde regardait, adorait, convoitait – les publicistes comme la CIA – et qui au final, malgré le nombre incalculable de personnes gravitant autour de lui, connut une vie d’une solitude aussi grande que le fut sa taille.
Un beau livre sur la différence, l’incompréhension, et les difficultés à communiquer, qui sait prendre son temps, s’attarder sur les silences et les non-dits pour mieux comprendre ses personnages, leurs sentiments intimes, leur infinie mélancolie… et les illustrer par de doux dessins aux couleurs d’automne.
L’histoire secrète du géant, de Matt Kindt (ed. Futuropolis)
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