Branle-bas de combat à Fort Bond : toutes les femmes ont disparu !
Enlevées par les vils Apaches peuplant les territoires voisins ? Sûrement !
Sans perdre une minute, un bataillon d’élite est détaché pour voler aux secours de ces faibles créatures sans défense.
Voilà une ouverture de rêve pour une grande aventure épique, emplie de folles chevauchées dans les plaines et d’affrontements enragés au fond des canyons…
Eh bien, non : on est même à mille lieues d’une adaptation papier de Fort Alamo ou La Prisonnière du Désert ! Si l’on tient vraiment à comparer West terne à ces grands classiques du genre, il faudrait plutôt en imaginer une improbable version revisitée par les Monthy Python ou Mel Brooks, du genre La Folle Histoire du Far West. Plutôt qu’une grande aventure épique, Michel Galvin nous propose une succession de petites mésaventures comiques. Plutôt qu’un lonesome cow-boy héroïque qui marche vers un magnifique couché de soleil, il nous propose une poignée d’antihéros ridicules qui auraient passé trop de temps à trainer sans chapeau sous un soleil de plomb.
En guise de bataillon d’élite, on se retrouve donc avec un chaud-lapin obsédé par le troussage de jupons autant que par les sauts spectaculaires qu’exécutait Jean-Marais, un avatar du Sergent Garcia se trimbalant avec une culotte sur la tête pour faire marrer la compagnie, et un fiancé cocu plus apte à s’extasier devant l’architecture romaine que face aux charmes de sa donzelle. Un trio déglingo’ arborant tutu, peau d’ours, et armure de légionnaire en guise de tenues de camouflage, auquel viendra se greffer un indien très à cheval sur la syntaxe…
Vous l’aurez compris, les mots d’ordre de ce western seront grand-n’importe-quoi et décalage !
Décalage qui se traduit également au niveau graphique : plutôt que des grandes cases au dessin chiadé et bourré de détails, Michel Galvin choisit un style beaucoup plus brut où des personnages au rendu « photocopie » sont découpés grossièrement et collés sur des décors simplistes et dépouillés, à peine agrémentés de quelques trames minimalistes… Radical, atypique, et bluffant !
Pile à l’opposé de son titre, ce western est tout sauf terne : des perso’ hauts en couleurs (même en noir & blanc), succulents et délirants, pour un trip burlesque, absurde, et loufoque, trouvant l’équilibre subtil entre détournements des gimmicks du genre, anachronismes, comique de répétition, et humour à la con intelligent… si, si !
Alors si la morosité vous menace, appelez vite la cavalerie !
West terne, de Michel Galvin (ed. Sarbacane)
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Ca, c’est de la politique éditoriale – même si pas du tout concertée.
La critique de « West terne » qui tombe pile-poil après la critique de « True Grit », c’est un heureux hasard…
Et le pire, c’est que j’ai failli utiliser ce jeu de mot en titre « un western tout sauf terne… ». Ouf! On a frôlé l’incident diplomatique… 🙂
@ Boustoune : que veux-tu, quand on est bon…
…que John Wayne soit avec toi, mon ami !
« Un western tout sauf terne » ? Mouarf… Mais c’est excellent! 🙂
@ Julien :
Aaaargh, ma modestie sans faille ne me laissera pas jouir de la propriété de ce jeu de mots (excellent, en effet), celui-ci n’étant qu’un détournement du titre (excellent) de l’album (excellent), et donc sorti tout droit de l’esprit (excellent) de son auteur (excellent)…!