Salvatore est un chien. Julie est une chienne.
Salvatore aime Julie, mais Salvatore habite à Grenoble et Julie en Amérique du Sud.
Salvatore deviendra donc mécanicien – un mécanicien de renom – et s’affairera à créer un véhicule capable de traverser le monde pour rejoindre sa dulcinée.
Ce véhicule sera la métaphore de son amour ; un magnifique vaisseau, immense, puissant, à toute épreuve, capable de déplacer les montagnes… ou au moins de gravir celles qui le séparent de son aimée !
Dans les premiers tomes, nous découvrirons donc Salvatore, personnage singulier, bourré de défauts, un poil énervant, irritant même parfois ; mais tellement romantique qu’on ne peut que le pardonner et s’y attacher.
Nous le verrons se démener comme un diable et user de méthodes plus ou moins avouables pour trouver la pièce ultime et rarissime manquant à sa Julie-Mobile.
Puis viendra l’heure du grand départ, et nous suivrons alors les tribulations de notre cabot sur cette route semée d’embuches et d’épreuves qui lui feront réaliser qu’il est difficile, le chemin menant à l’Amour !
Au cours de ces aventures, Salvatore croisera tout un tas de veaux, vaches, cochons, et autres animaux hauts en couleurs, qui eux même rencontrerons d’autres animaux, qui eux même en connaitrons d’autres… Au fil des pages, apparaitra alors une ribambelle de personnages secondaires plus ou moins importants, mais tous aussi succulents ; de la truie myope à la recherche de son porcelet perdu, à la chatte gothique à l’instinct maternelle hypertrophié, en passant par les douaniers suisses aussi susceptibles que légendairement lents.
Beaucoup de monde, donc, mais du beau monde.
L’aventure avancera lentement, au même rythme que les déplacements de Salvatore, mais comme à son habitude Nicolas De Crécy (auteur du terrible Léon La Came) prendra son temps pour développer comme il faut ses personnages. Il s’attardera sur chacun d’eux pour leur donner une réelle personnalité, une certaine profondeur, et parviendra à rendre ses animaux plus humains que le seul homme présent dans cette série… réduit au rang d’animal de compagnie !
Son trait – personnel, vivant, vibrant, touchant, à la fois épuré et travaillé – amènera encore plus de sensibilité à cette jolie fable. Sensibilité soulignée par ces sublimes couleurs pastelles, si douces et lumineuses, qui nous ravissent l’œil et le cœur…
Une bien belle aventure, donc, que celle de Salvatore et ses compères ; drôle, tendre, poétique, légère, et absurde… Mais attention, pas de l’absurdité de bas étage à la Wayne’s World : ici, Nicolas de Crécy atteint plutôt des sommets proches de l’Ecume des Jours d’un Boris Vian !
Salvatore, par Nicolas de Crécy (ed. Dupuis)
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