Abandonnant momentanément son cow-boy immortel au sale caractère*, Jérôme Jouvray retrouve ici son compère* Stéphane Presle pour nous proposer un voyage vers l’île de la Réunion.
De plus, Stéphane Presle y ayant vécu quand il était gamin, il s’offre le luxe de dialoguer une grande partie de cet album en créole, pour une immersion encore plus totale.
Vous vous y voyez déjà ? Une belle plage de sable blanc bordée de cocotiers, un cocktail à la main, un vieil air de zouk en bande sonore… et un album drôle et léger à bouquiner en vous faisant dorer la pilule sur votre transat ?
Hé bien, oubliez !
Loin de ces clichés enchanteurs, les auteurs nous montrent ici à quel point la réalité est bien plus rude pour les insulaires que ce que nous, métropolitains, ne pouvons imaginer.
Dans cet ouvrage, il nous sera donner l’occasion de voir à quel point le chômage est un fléau à la Réunion, entraînant pauvreté, mendicité, vols, et violence. D’autres maux serons pointés du doigts, comme le racisme et la haine qu’il entraîne (envers les Comoriens, envers les métropolitains), la drogue, les règlements de compte, et surtout le tourisme : comment il peut-être néfaste à l’écosystème de l’île, comment il perverti les insulaires prêts à vendre leur âme, leur culture et leur dignité à « Babylone » ; mais aussi comment le touriste lui-même en est inconscient, ou pire : insouciant.
Et pourtant, on ne tient pas là un bouquin noir, ni même moralisateur.
Les auteurs nous font prendre conscience de la situation outre-mer, certes, mais ils le font intelligemment, sans lourdeur. Au lieu d’en faire le sujet principal, cette dure réalité ne sera que la toile de fond sur laquelle se dérouleront les (mes)aventures de Nelson ; un adolescent des bidonvilles, qui, plutôt que de s’apitoyer sur son sort et celui de ses compères, tente de survivre aux mieux dans ces rudes conditions.
Grâce au trait plein de sensibilité de Jérôme Jouvray – lui-même rehaussé par les magnifiques et chaudes couleurs de sa femme, Anne-Claire – on se laissera facilement embarquer dans les déambulations de ce jeune garçon, tendre et touchant. Il saura nous séduire, nous émouvoir… et nous faire trembler tant on le laissera dans une mauvaise posture à la fin de ce premier tome !
Raaaaah, vivement la suite que l’on sache comment il se sortira de ce bien mauvais pas !
La Pès Rekin, première partie, par Jérôme & Anne-Claire Jouvray et Stéphane Presle (ed. Futuropolis)
* A lire aussi, des mêmes auteurs, Lincoln et l’Idôle Dans La Bombe.
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Libraire éditeur depuis 13 nas je ne partage ce florilège d’éloges. Certes le dessin de JOUVRAY est assez agréable (au point qu’un stick le rappelle) mais l’histoire est creuse, pleine de poncifs et pourrait se dérouler n’importe où sur la planète terre.
Tout n’est pas idyllique ici (et j’y vis depuis 41 ans) mais je ne retrouve pas la Réunion dans cette histoire ou les chiens appâts (le fait d’une poignée d’abrutis que l’on compte sur les doigts d’une seule main) serve d’accroche marketing pour un mélo façon zola complètement creux.
Bref de la mauvaise sociologie et un auteur, certes né ici mais qui appararement n’y a pas vécu suffisament longtemps
@ Jean-Luc : Hé bien Jean-luc, merci pour ces précisions sur la Réunion, île que je ne connais pas (encore !). Je pense qu’il est intéressant de ne pas citer que les côtés paradisiaques de cette île, et d’en montrer les problèmes aux métropolitains. Presle a peut-être grossi le trait sur la situation locale, certes, mais il ne revendique en aucun cas cet album comme un récit auto-biographique. Une histoire romancée peut se permettre quelques écarts quant à la réalité. Et le fait d’y placer un pécheur avec de telles manières ne veut en aucun cas dire que tout le monde en fait ainsi à la Réunion ; il serait dommage de faire cet amalgame.
Personnellement, j’ai trouvé très touchante l’histoire de ce p’tit gars, d’autant plus sous les crayons et palettes des Jouvray !
d’accord paka sur le principe de « précaution » des amalgames. Mais justement la réalité (sociale) est pour partie pire que celle effleurée (attendons la suite). Pourquoi alors metre en avant un épiphénomène (5pages/160 prévues en 2 tomes) n’ayant rien à voir avec le sujet traité ??
Mon cher Paka sachez aussi que les requins ne servent pas à la décoration des plats des restaurants (jamais vu depuis 1969). Peut être que là aussi je ne fréquente pas les bons restaurants.
@ Jean-Luc : …ou peut-être fréquentez-vous les bons restaurants, justement !
Pour ce qui est du reste, on en reparle avec plaisir à la parution du tome 2… le RDV est prit ^_^
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