Chalut les humains,
Vous le savez, mon nom est inspiré d’un célèbre film de cape et d’épée avec Stewart Granger, parce que petit, je ne kiffais rien tant que de me battre en duel avec les plantes vertes et bondir partout. Aujourd’hui encore, pendant mon quart d’heure de folie, j’aime à me glisser dans la peau d’un de ces héros virtuoses de l’escrime qui faisaient le bonheur des films hollywoodiens d’antan, les chevaliers, les mousquetaires… Et aussi, quand je suis d’humeur canaille, les pirates.
Ah! La joie de grimper aux rideaux du salon comme un moussaillon grimpe le long du mât, le plaisir de creuser dans les sacs de litières neufs pour y chercher des trésors – on en trouve jamais, certes, mais je peux alors y enterrer les miens… – la satisfaction ineffable de tendre une embuscade à mon marin d’eau douce de maître, quand il est en tranquillement en train de naviguer sur le net, à la pêche aux informations pour écrire sa nouvelle critique… Hi hi hi, appelez-moi, Capitaine Scaramouche, le pirate des Scara-ïbes…
D’ailleurs, c’est justement du quatrième épisode de la saga Pirates des Caraïbes, La Fontaine de Jouvence, dont je dois vous parler aujourd’hui.
Après un premier volet réussi, dans la grande tradition du film d’aventures à l’ancienne, puis deux suites un peu longuettes, il était temps de donner un nouveau souffle à cette série populaire en changeant d’enjeux et de personnages.
Quoi !?! Les scénaristes auraient évincé le Capitaine Jack Sparrow ??? Vite, qu’on les jette par dessus bord!
Oulah, non, rassurez-vous, incarné avec malice et, apparemment, beaucoup de plaisir par Johnny Depp, le fameux pirate est toujours là… Tout comme son vieil ennemi Barbossa (Geoffrey Rush), qui s’est engagé comme corsaire au service de la couronne britannique pour redorer son blason…
En revanche, exit Keira Knightley et Orlando Bloom qui doivent laisser la place à la bouillante Penelope Cruz, qui incarne Angelica, une femme-pirate au caractère bien trempé et au sabre virevoltant, ancienne maîtresse de Sparrow, à un prêtre dont la foi est mise à rude épreuve (Sam Claflin) et, pour corser l’affaire, au terrible Barbe Noire (Ian McShane)…
L’enjeu de cette nouvelle aventure est, comme l’indique le titre, la légendaire fontaine de jouvence, capable de prolonger la vie de celui qui sait où la trouver, et comment l’utiliser. Jack Sparrow la cherche depuis longtemps, et, muni de sa boussole ensorcelée, est sur le point de toucher au but.
Mais il n’est pas le seul à convoiter la fameuse fontaine, loin de là! Barbe Noire la cherche aussi, ainsi que Barbossa, les officiers anglais et les espagnols…
Cela donne lieu à une belle chasse au trésor, pleine de coups fourrés, de trahisons et d’alliances contre nature, d’héroïsme et de lâcheté, de combats épiques et de créatures fantastiques…
Ah, au fait, pour ceux qui se souviennent encore avec émotion de La Petite Sirène de John Musker et Ron Clements et qui croient encore que les sirènes sont de douces et aimables créatures, préparez-vous à un choc. Ici, les belles hybrides femmes/poissons aguichent les hommes pour mieux les entraîner au fond de l’océan et sucer leur – hé, qu’est-ce que vous allez imaginer, là… – leur énergie vitale, telles des vampires…
Et là où vont nos héros, il y en a un paquet… Je vous laisse imaginer le carnage !
L’attaque des sirènes est sans doute la scène la plus spectaculaire du film, et la plus appréciable, avec l’introduction, qui voit Jack Sparrow se jouer de la justice britannique et tenter une spectaculaire évasion, digne des grands films de cape et d’épée que j’évoquais plus haut.
Pour le reste, c’est moins convaincant. Le film est certes riche en péripéties, bien mieux rythmées que les soporifiques batailles navales du troisième épisode, mais tout s’enchaîne selon un rythme trop mécanique, comme les tableaux d’un jeu d’arcade – d’ailleurs, un jeu pour consoles est bien sorti, ça fait partie des produits dérivés… – et cela manque un peu d’imprévisible, de folie et d’originalité.
On attendait mieux de Rob Marshall, qui signe d’ordinaire de petits bijoux de chorégraphies dans ses comédies musicales (Chicago, Nine)… Là, c’est assez conventionnel. Un pur produit de série…
Par ailleurs, le relief plombe la plupart des scènes d’action. Non pas qu’il soit raté. A vrai dire, il fonctionne même plutôt bien, avec des effets spécialement conçus pour la 3D. Mais les lunettes, une fois de plus, assombrissent l’image, et dans les scènes nocturnes, déjà rendues confuses par un montage trop nerveux, cela s’avère fort préjudiciable.
Ca manque aussi un peu d’humour, hélas. Johnny Depp nous sert son numéro habituel, tout en mimiques malicieuses, et ses joutes verbales avec Penelope Cruz valent le détour, mais ça ne suffit pas. En fait, il manque tous ces personnages secondaires rigolos qui peuplaient les premières aventures de nos pirates. Et, peut-être, l’aisance comique de Gore Verbinski, le réalisateur de la première trilogie, parti s’aventurer sur des terres plus arides, mais autrement plus réjouissantes, avec Rango.
Cela dit, Pirates des Caraïbes : La Fontaine de Jouvence se laisse voir. Même si l’abondance de morceaux de bravoures finit par nous fatiguer, on n peut pas dire que l’on s’ennuie. Et sans se hisser au niveau du premier opus, ce quatrième épisode est d’un niveau honorable. Meilleur, en tout cas, que le précédent chapitre. Mais si on doit repartir sur deux nouvelles aventures, il faudra quand même trouver quelque chose pour redynamiser la franchise, sans quoi le public abandonnera le navire. On suggère plus court, plus drôle et plus dans l’esprit des vieux films du genre, ceux avec Errol Flynn notamment…
Bon, il faut que je vous laisse…
Ma boussole magique m’indique un banc de crevettes échoué dans le frigo. Je vais de ce pas dérober ce trésor au nez et à la barbe (noire) de mon maître. Hé hé… A l’abordage !
Pleins de ronrons,
Scaramouche
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Pirates des Caraïbes, La Fontaine de Jouvence
Pirates of the Caribbean, on stranger tides
Réalisateur : Rob Marshall
Avec : Johnny Depp, Penelope Cruz, Geoffrey Rush, Sam Claflin, Ian McShane, Astrid Bergès-Frisbey
Origine : Etats-Unis
Genre : mille milliards de mille sabords
Durée : 2h20
Date de sortie France : 18/05/2011
Note pour ce film : ●●●●○○
contrepoint critique chez : Excessif
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