Miss[Hors compétition]

De quoi ça parle?

D’un jeune homme, Alexandre, qui se décide enfin à réaliser son rêve d’enfance : devenir Miss France.
A l’époque, toute sa classe s’était moqué de lui. Un garçon ne peut pas devenir miss France, voyons. Ca se peut pas! Ouh, la femmelette! Ah ah ah, la fille!
Aujourd’hui, les mentalités ont à peine changé. L’homosexualité, la transsexualité, la notion de genre sont toujours des questions un peu taboues, ou du moins promptes à diviser l’opinion. Mais Alex ne veut plus dissimuler sa part féminine. Non seulement il est prêt à affronter le regard des autres, mais en plus il veut devenir une femme de référence, l’incarnation du charme et de l’élégance. Pour cela, il peut compter sur le soutien de sa famille de coeur – dont un vieux travesti qui va se charger de sa transformation physique –, de son coach, un ami d’enfance devenu champion de boxe, et de la responsable du concours, qui semble séduite par ce profil “différent” des autres candidates.
Il parvient à faire illusion pendant les concours régionaux en devenant Alexandra, mais il lui reste encore à passer toutes les étapes de sélection permettant de désigner les finalistes du concours Miss France, affronter des rivales prêtes à tout pour le titre et subir les règles un peu “vieille France” du programme. Mais pour Alex, le plus grand écueil à éviter est peut-être de se perdre dans un rôle, une fonction, et oublier qui il/elle est vraiment.

Pourquoi on vote pour le film ?

Avant tout pour l’interprète du film, Alexandre Wetter, qui incarne ce personnage ayant un rapport au genre particulier, ni homme ni femme, et un peu des deux en même temps, ni Alexandre, ni Alexandra, juste Alex. Cette histoire, bien que fictionnelle, est un peu la sienne, qui a dû surmonter les railleries et le regard des autres avant de devenir mannequin androgyne pour Jean-Paul Gaultier. On sent qu’il s’investit pleinement dans ce rôle, qu’il partage les mêmes interrogations que le personnage et défend son droit à la différence, son besoin d’affirmer toutes les facettes de sa personnalité. Il est absolument épatant et crédible d’un bout à l’autre.

Pour le cinéaste Ruben Alvès, qui avait déjà séduit avec son premier long-métrage, La Cage dorée et qui a eu le courage de se lancer dans ce drôle de projet qui aurait pu facilement se noyer sous les bonnes intentions ou le kitsch du concours de Miss France.

Mais aussi parce qu’il s’agit d’une comédie bien ficelée, qui s’appuie autant sur les mécanismes du “feel good movie” – on pense un peu à un film comme Little Miss Sunshine – et sur des répliques cinglantes – on aime particulièrement le “C’est Miss Lorraine, ça vient de là le côté quiche…” – que sur ceux du divertissement sportif stimulant façon Rocky. Alex subit un entraînement tout aussi dur – pompes, abdos, jogging. Pas de boxe contre des carcasses de boeuf, d’accord, mais des cours de maintien façon Baronne de Rotschild où un verre doit être à bonne hauteur, au millimètre près. Pas d’escaliers montés et descendus au pas de course, mais des kilomètres parcourus en talons aiguilles – pas facile quand on n’a pas l’habitude et qu’on taille du 42 dans une paire de 41…
L’inconvénient de ce genre de film, c’est qu’il y a souvent un coup de mou au bout de l’heure de jeu, car les rebondissements, les embûches rencontrées, le yoyo du moral dans la dernière ligne droite sont toujours des péripéties stéréotypées et Miss ne déroge pas vraiment à la règle, mais les personnages sont si attachants qu’on lui pardonne volontiers cette courte baisse de régime.
D’autant que, la force de ce genre de récit, c’est qu’il est construit de façon à culminer lors du grand final, et que, quelque soit l’issue du concours, le personnage en sorte grand gagnant. Ici, Alex réussit à se faire accepter tel qu’il/elle est, parvient à s’assumer et peut-être à modifier le regard des autres sur son genre.

Miss ne se revendique nullement un film politique, juste une comédie autour de personnages atypiques, mais alors qu’en France, des personnes continuent, malgré le coronavirus, à manifester contre toutes les mesures mises en place pour les citoyennes et citoyens homosexuel.le.s et à combattre farouchement la théorie du genre, il s’avère fort utile pour défendre le droit à la différence et à la reconnaissance.
Les réactions imbéciles, pleines de haine homophobe et transphobe, qui ont accompagné l’annonce du report de la sortie du film d’avril à octobre, nous donnent encore plus envie de le soutenir.

Autres avis sur le film :

”Miss n’est ni un drame psychologique sur l’identité transgenre, ni un pamphlet anti-patriarcal sur la représentation sexiste des femmes dans les médias et la culture populaire, même si quelques éléments en ce sens affleurent à la surface, mais plutôt un conte de fées moderne sur le pouvoir de la volonté et l’importance de croire en ses rêves.”
(Aurore Engelen – Cineuropa)

”Une dramédie pleine d’humanité et de courage, loin des stéréotypes, loin des clichés (même si on en retrouve un peu quand même), loin des vulgarités et autres facilités de la comédie française. « Miss » est une très belle surprise, doublée d’un très beau coup de cœur.”
(Cineted – Lavisqteam)

”PERSONNE ne veut voir ce film! Ca n’interesse personne…”
(Lafrite1996 sur allociné. QI de patate, qui n’a probablement pas vu le film)

”propagande lgbt!”
(Urb 7 sur allociné. Et voilà la théorie du complot, maintenant… 7 pour sept neurones)

Crédits photos : Copyright Warner Bros. France / image tirée du film fournie par le FIFF de Namur

REVIEW OVERVIEW
Note :
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Rédacteur en chef de Angle[s] de vue, Boustoune est un cinéphile passionné qui fréquente assidument les salles obscures et les festivals depuis plus de vingt ans (rhôô, le vieux...) Il aime tous les genres cinématographiques, mais il a un faible pour le cinéma alternatif, riche et complexe. Autant dire que les oeuvres de David Lynch ou de Peter Greenaway le mettent littéralement en transe, ce qui le fait passer pour un doux dingue vaguement masochiste auprès des gens dit « normaux »… Ah, et il possède aussi un humour assez particulier, ironique et porté sur, aux choix, le calembour foireux ou le bon mot de génie…

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