Au loup, au loup! La bête revient!
Hein? Oui, la bêtise aussi, c’est vrai…
Argh! Catherine Hardwicke rôde… Après l’ennuyeux Twillight : fascination et ses vampires boules à facettes, elle s’attaque aujourd’hui à un autre mythe du cinéma fantastique : le loup-garou.
Mais comment faire? Ici, elle ne peut pas s’appuyer sur un roman à succès et il lui faut trouver une histoire sur laquelle broder et faire évoluer son monstre poilu. Tiens, pourquoi pas le conte du “Petit Chaperon Rouge”? Il y a un loup dedans, super! Et une héroïne jolie comme un coeur, pure et innocente…
Bon, le hic, c’est que le conte n’est pas très long et qu’il faut tenir plus d’une heure et demie avec une trame assez basique… Pas grave, il n’y a qu’à meubler un peu… Il suffit de rajouter une bonne louche de romance pour teenagers, comme dans Twillight…
Hop! Voilà l’héroïne, Valerie (Amanda Seyfried) oscillant entre deux hommes, le fiancé que lui imposent ses parents, le forgeron Henry (Max Irons), et son amour d’enfance, le bûcheron Peter (Shiloh Fernandez). Le premier est beau et riche, le second est pauvre, mais elle l’aime d’amour. Que faire? Obéir à Maman (Virginia Madsen) et Papa (Charles Burke, déjà père de l’héroïne de Twillight, comme quoi, l’inspiration est frappante…) ou fuir avec son beau ténébreux?
Son dilemme est de courte durée, car un deuil frappe brutalement sa famille : sa soeur a été réduite en morceaux par une bête féroce, un loup gigantesque…
Une battue est menée et porte ses fruits : la tête de la bête est rapportée au bout d’une pique. Mais alors que les villageois s’apprêtent à célébrer cela, le Père Salomon, l’inquisiteur envoyé à la rescousse, leur fait part de ses doutes. Il est persuadé que la créature recherchée n’est pas un animal ordinaire mais un loup-garou. (ô surprise…).
Le jour, elle se cache sous les traits d’un être humain et peut-être n’importe qui, un voisin, un ami, un parent…
Et voilà, le tour est joué. Le Chaperon rouge ne repose que sur ces deux axes narratifs : la bluette amoureuse à l’eau de rose et le whodunit classique, avec rebondissements et fausses pistes en tous genres…
D’ailleurs, Catherine Hardwicke et son scénariste David Leslie Johnson – ne la laissons pas assumer seule l’étendue du fiasco – abusent des effets destinés à entraîner le spectateur dans la mauvaise direction. Ah, les apparitions-surprises de la mère-grand (Julie Christie, qui semble se demander ce qu’elle fiche ici) toujours accompagnées du petit bruit de cymbale qui fait peur! Ah, les yeux des personnages qui viennent se fondre à ceux du loup pour nous laisser à penser qu’ils pourraient être le monstre! Ou cet emballement de l’image et du son dès que quelqu’un dit à l’héroïne “viens avec moi…” juste parce que ce sont les mots prononcés un peu plus tôt par le loup-garou…
On se croirait dans un slasher de série Z… Et encore, sur le même schéma narratif, Hurlements V : la renaissance, avec son intrigue façon “dix petits nègres” chez les loups-garous, était autrement plus amusant…
Ici, on s’ennuie l’essentiel du temps, et même les attaques du loup – cartoonesque et assez laid, il faut bien le dire – ne parviennent pas à dynamiser le récit. Bien sûr, vu que la cible du film est un public adolescent, il ne fait pas très peur et y va pianissimo sur les effets sanglants, donc on ne peut même pas compter sur l’aspect horrifique pour pimenter une intrigue bien fade, aussi fade que ses protagonistes principaux.
Shiloh Fernandez et Max Irons sont peut-être parfaits comme mannequins masculins, mais ils ont une palette de jeu franchement limitée. Amanda Seyfried, s’en sort à peine mieux, passant son temps à écarquiller les yeux face aux suspects potentiels. Certes, ils sont magnifiques, ses yeux, mais bon, ça va cinq minutes. Elle était nettement plus convaincante dans Jennifer’s body ou même dans Mamma mia! (qui est pourtant loin d’être bon…).
Pour terminer la revue d’effectif, si nous sommes très contents de revoir sur grand écran Julie Christie et Virginia Madsen, on s’interroge sur la pertinence d’engager des actrices de ce rang-là pour camper des personnages aussi insignifiants et mal exploités. Quant à Gary Oldman, il est le seul à tirer son épingle du jeu, en inquisiteur aussi néfaste et vicieux que la bête qu’il combat, mais, dans son registre de prédilection, il a tendance à cabotiner sans vergogne…
Cela dit, il ne fallait pas s’attendre à des miracles. Les personnages n’ont quasiment aucune épaisseur, aucune ambiguïté, et Catherine Hardwicke semble se désintéresser complètement de la direction d’acteurs, trop préoccupée à soigner sa mise en scène.
Enfin, “mise en scène” est un bien grand mot. C’est probablement le défaut le plus rédhibitoire du film. La caméra passe son temps à bouger, à décrire des cercles autour des personnages, sans aucun motif valable. La cinéaste utilise des accélérés, des ralentis, là encore, sans aucune justification. Les scènes d’action sont confuses, les scènes romantiques sont kitsch au possible. Des effets ringards au service d’un environnement esthétique assez laid, tout en couleurs insaturées et flous artistiques…
Bref, c’est une catastrophe.
– Oh, mère-grand, comme tu as de grandes jambes…
– C’est pour mieux prendre mes jambes à mon cou et échapper à ce film calamiteux…
C’est exactement le conseil que nous vous donnons : évitez soigneusement cette version du Chaperon rouge et profitez du beau temps printanier pour vous promener dans les bois.
Non, ce film n’a rien du conte de fées. C’est plutôt un cauchemar pour cinéphiles, et nous sommes atterrés des efforts répétés de Catherine Hardwicke pour réduire le genre fantastique que nous aimons à ces bluettes pseudo-horrifiques pour midinettes.
Nous implorons la cinéaste de renoncer à la réalisation de ce genre d’infâme nanar et de se remettre à faire du cinéma, comme à l’époque de Thirteen, la seule vraie réussite de sa carrière. Sinon, nous nous verrons contraints de la traquer et de ramener sa tête au bout d’une pique. Même pas peur !
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Le Chaperon rouge
Red Riding hood
Réalisatrice : Catherine Hardwicke
Avec : Amanda Seyfried, Julie Christie, Virginia Madsen, Gary Oldman, Shiloh Fernandez, Max Irons
Genre : Rance avec les loups
Durée : 1h40
Date de sortie France : 20/04/2011
Note pour ce film : ●○○○○○
contrepoint critique chez : Les Inrockuptibles
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