Est-ce le cap de la quarantaine ou bien ses récents déboires conjugaux? Toujours est-il qu’elle a bien mauvaise mine, Vanessa Paradis, dans Cornouaille, le nouveau film d’Anne Le Ny…
Cela sert le rôle, remarquez, puisqu’elle incarne Odile, une femme fatiguée, proche de la quarantaine et incapable de mettre de l’ordre dans sa vie, engluée qu’elle est dans une relation médiocre avec un ex flirt, aujourd’hui marié et père de famille, et peu pressé de tout plaquer pour vivre avec elle. A la suite du décès de sa tante Bernadette, elle hérite d’une maison en Bretagne, en Cornouaille. Elle doit se rendre sur place pour vider les lieux avant de les vendre, car elle ne souhaite pas conserver cette bicoque qui lui évoque moins des souvenirs d’enfance joyeux que la mort de son père, l’année de ses douze ans.
Dès qu’elle s’approche de la maison, elle ressent un profond trouble, et des évènements étranges surviennent : trousseau de clés baladeur, apparitions de fantômes venus tout droit du passé et intrusion d’un vieux copain d’enfance dont elle n’a aucun souvenir…
Dit comme cela, Cornouaille comme un film d’épouvante classique, avec revenants et lourds secrets enfouis. Mais disons-le tout de suite, il ne s’agit pas d’un film d’horreur. Plutôt une horreur de film…
Cette trame fantastique, et le suspense mis en place autour du personnage joué par Samuel Le Bihan – Est-ce un fantôme? Est-ce un homme bien vivant? Et est-il qui il prétend être – s’effacent devant un drame psychologique assez basique dans lequel Odile s’interroge sur sa vie, son passé et son avenir.
On doit donc braver l’ennui pour voir Vanessa Paradis se prendre la tête pour décider si elle est heureuse ou non, se torturer l’esprit pour savoir si elle ferait une bonne mère de famille alors qu’elle a été longtemps fâchée avec sa propre mère et se demander naïvement si elle ne ferait pas mieux de laisser tomber son amant, dont on devine très vite qu’il n’est rien d’autre qu’un connard pathétique et lâche…
Et comme si ces questionnements peu subtils ne suffisaient pas à plomber le film, on doit aussi supporter quelques aphorismes assez risibles assénés à l’héroïne par d’autres personnages, tels que "C’est difficile d’avoir de bonnes relations avec les vivants si on ne sait pas vivre avec les morts" ou “Tu n’es pas triste parce que tu as perdu ton amour, tu es triste parce que tu n’arrives pas à aimer…”.Pff…
Entre deux scènes philosophico-mystiques, on croise des personnages agaçants, comme ce notaire (Laurent Stocker) qui se demande s’il a vraiment une tête de notaire reconnaissable entre mille ou si le port d’une cravate fantaisie changerait la donne, ou cet ado obsédé par les rituels vaudous et les histoires de revenants. Les personnages sont tellement, aux choix, banals ou saugrenus qu’on n’en voudra pas aux acteurs leur manque de justesse de jeu et/ou leur cabotinage éhonté. Mais on sera moins clément envers Anne Le Ny, qui les a laissé faire, d’autant que la cinéaste est actrice de formation et a su, par le passé, se montrer brillante directrice d’acteurs. Si encore elle avait pu apporter quelque chose de particulier au niveau de la mise en scène ou de l’esthétique globale de l’oeuvre, on aurait pu lui pardonner beaucoup. Hélas, la mise en scène est plate, peu inspirée, sans signe distinctif pouvant indiquer qu’elle porte la patte de son auteure. C’est simple, on dirait un mauvais téléfilm français, une de ces productions pépères que les chaînes passent le samedi soir pour un public tout aussi pépère. Pas besoin d’aller au cinéma pour voir ça…
Oh bien sûr, il y a de belles images de la côte bretonne. C’est bien le minimum que l’on pouvait attendre d’un film qui se titre Cornouaille, mais c’est insuffisant pour maintenir notre attention. A vrai dire, l’atmosphère venteuse du film donne surtout envie de mettre les voiles au plus vite.
On est d’autant plus déçus qu’on avait adoré, de la même cinéaste, son premier film, Ceux qui restent, et que, sans être totalement conquis, on avait trouvé des qualités à son second, Les Invitées de mon père. Là, on ne trouve pas grand chose à sauver de ce fantôme de film.
Est-ce le cap de la quarantaine, la surcharge de travail ou l’overdose de films médiocres? Toujours est-il que l’auteur de ces lignes fait lui aussi grise mine devant ce Cornouaille de bien piètre facture…
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Réalisatrice : Anne Le Ny
Avec : Vanessa Paradis, Samuel Le Bihan, Jonathan Zaccaï, Catherine Vinatier, Aurore Clément, Laurent Stocker
Origine : France
Genre : fantôme de film
Durée : 1h36
Date de sortie France : 15/08/2012
Note pour ce film : ●